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Sébastien Guerrier, l’heureuse surprise

vivre-debout-visuel-digipack-300x269Parmi les nombreux cloisonnements de la chanson, il en est un fameux qui isole la chanson traditionnelle (ce que dans les années soixante-dix nous nommions le folk) du reste de la chanson, comme si c’était un sous-genre indigne de la chanson d’auteur, de la chanson de paroles. Comme si une chanson traditionnelle, de fait polie par le temps et la transmission, ne pouvait souffrir la comparaison avec notre chanson contemporaine. Comme si le fait de n’en pas connaître les auteurs en faisait une chanson batarde.

Le chanteur Sébastien Guerrier, lui, partage son art entre le traditionnel (il anime des bals folk vocaux, à trois voix précisément) et une chanson plus actuelle, qu’elle soit de son cru, qu’elle reprenne Dimey, Brel, Aragon ou Louise Michel, ou qu’elle offre sa plume à un parolier comme Cyril C. Sarot (parolier, entre autres, de Coline Malice et de Michel Boutet). Et souvent les fait se rencontrer.

Après dix ans passés au sein de son ancien groupe Sabayo (sur la toile, c’est sabayo.net !), groupe d’abord de reprises (Brel, Ferré, Piaf…) puis de créations, Guerrier poursuit son itinéraire son son nom, avec un premier album qu’il serait dommage de confiner aux environs de Clermont-Ferrand, où vit l’artiste.

Il faut parfois une clef, un choc, pour entrer dans un album. Là, c’est un titre, Vivre debout, de Jacques Brel, interprété comme jamais, avec une force que même Brel n’a pas su insuffler à sa chanson. Ça démarre dans une simplicité qui confine à l’épure, et monte crescendo au seul son d’une guitare qui, telle la voix, sait se faire nuances de tons. Et la voix se fait cris. C’est cette chanson, ce n’est pas pur hasard, qui donne le titre à l’album…

Avec une telle assemblée de paroliers, Guerrier inclus, on s’attend à des chansons consistantes : on les a. Du bien charpenté, qui plus est pas franchement neutre (ainsi Le bon citoyen, sur un texte de Sarot). C’est d’ailleurs ce qui fait, ça et la voix de Guerrier, l’unité de ce disque. La musique, elle, explore d’autres registres : folk (La Pouge et Les oiseaux de malheur (on pense aux Oiseaux de passage…), qui nous rappelle aux chansons d’antan en en reprenant des codes et des intonations, on ne se refait pas) ou reggae (Osent jouer sur la pavé) jouxtent une tonalité plus chanson qui oscille selon les influences (Les yeux sont assez brélien dans la forme ; Tina n’est pas sans faire songer au Lalanne que nous avons pu aimer jadis) et une rythmique à la Brassens anime les vers de Louis Aragon dans Second intermède. Les amateurs de Bernard Dimey se régaleront de L’école, mise en musique par Guerrier (qui, mis à part le Brel signe toutes les musiques de l’album). Et tous seront touchés, émus, par Louise, de Louise Michel, non chantée par Guerrier, mais parlée.

Beaucoup de franches réussites pour ce premier opus solo qu’on ne peut que vous recommander, qui plus est chaudement : c’est vrai que le chanteur, par ailleurs fervent militant de l’éducation populaire, n’en est pas à son coup d’essai, qu’il a des années de pratique derrière lui. La surprise est que le nom de Sébastien Guerrier semble confiné au seul Massif central alors que d’évidence son art devrait faire l’envie et la fierté de toutes les scènes francophones. Remarquez que c’est lors d’une émission sur Radio-Arverne, animée par Alain Vannaire, aux récentes Rencontres Marc-Robine, que nous l’avons découvert.

 

Sébastien Guerrier, Vivre debout, autoproduit 2015. Le site de Sébastien Guerrier, c’est ici. Pas vraiment de vidéo sur la toile, si ce n’est cette bande-annonce : Image de prévisualisation YouTube

3 Réponses à Sébastien Guerrier, l’heureuse surprise

  1. Marc Pommier 18 août 2015 à 11 h 17 min

    Cela fait partie des belles surprises des cadeaux de coeur d’ami(e)s offerts cet été pour un privé de festivals

    Répondre
  2. Olbius 21 août 2015 à 11 h 11 min

    Quelles sont les sources (livres, articles…) qui vous permettent d’affirmer que la chanson traditionnelle est sous-estimée chez nous , comme vous l’écrivez au début de votre article ?

    Répondre
    • Michel Kemper 21 août 2015 à 11 h 25 min

      L’observation, simplement, ce que je fais tous les jours.

      Répondre

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