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La Chanson française attaquée de tous quotas

(photo DR)

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Depuis vingt ans, la loi impose aux radios de diffuser au moins 40% de chansons en langue française, ce qui, sauf à vouloir taire notre langue, est bien le minimum. Si, contrairement à certains pays, on entend encore en France des chansons dans notre propre langue, c’est bien grâce à cette loi. C’est cette loi qui a sauvé la Chanson française.

Depuis vingt ans, les radios commerciales, NRJ, RFM et Fun radio en tête, se battent pour faire tomber cette dernière digue, ces quotas. Ah, le rêve d’antennes entièrement soumises à l’anglo-saxon… Pour l’argent, NRJ est prête à renier sa langue maternelle. Et, de toute façon, triche en permanence, elle et ses consœurs. Ces 40% obligés de langue française, elle les réalise sur dix titres seulement, matraqués à mort, « en rotation » comme on dit. Exit la diversité culturelle (les grands mots tout de suite : si vous leur parlez de culture, les abrutis d’NRJ sortent leurs flingues !).

JANN HALEXANDER : « SI LE GRAND PUBLIC NE RÉAGIT PAS, QUI LE FERA? » J'ai effectivement signé cette pétition que j'ai reçue de la Sacem le 9 juin. Il n'y a pas eu de démarche particulière de ma part. Habituellement je suis très méfiant vis-à-vis des pétitions, j'en signe rarement, même si j'en reçois régulièrement. Les pétitions parfois jouent sur l'émotion au détriment de la complexité d'une situation donnée, je pense. Ici, la pétition était plutôt claire. J'aurais pu ne me pas sentir concerné : je passe très peu en radios. « A Table » et « Il est minuit Docteur Schweitzer » ont bénéficié de quelques passages radios, mais en général c'est plutôt anecdotique, tellement anecdotique que lorsqu'« A Table » a été diffusé sur France Inter, j'ai reçu des félicitations de collègues, ce qui m'a laissé très perplexe. Mais si je passe peu en radio, et je ne suis qu'un cas parmi d'autres, c'est parce que le nombre d'émissions musicales radiophoniques a drastiquement baissé ces vingt dernières années. Il en est de même d'ailleurs pour la télévision – un passage d'une heure sur TéléSud, comme ce fut le cas en 2015, ce serait quasiment inenvisageable à l'heure actuelle. C'est dire si les choses changent vite, trop vite et dans le mauvais sens pour les artistes. Le nombre d'émissions musicales baisse, il y a une concentration des monopoles et la diversité des playlists, déjà limite, baisse dangereusement. Si le grand public, capable de se plaindre de ce manque de diversité, hélas, ne réagit pas pour autant, alors qui le fera ? Ce serait tentant pour les artistes, connus, très connus, moyennement connus, peu connus, inconnus, de rester chacun dans son coin, en essayant de tirer profit de la situation. En clair : Chacun pour soi et la Chance pour tous. Mais j'ose penser qu'il y a urgence. Et c'est bien la Sacem, dont je suis membre depuis 2004 (j'ai débuté dans la musique en 2003) qui a envoyé cette pétition.  Si j'ai signé, ce n'est pas uniquement par peur de la baisse de la diversité des musiques à la radios. Cette baisse est déjà effective, elle est importante, j'en ai pris acte. Personnellement j'ai été ammené à faire de ma vie d'artiste un mode de vie plus qu'un métier, tellement les mutations sont violentes, profondes et accélérées. Cela implique toute une organisation pour ne faire que ça. - et un entourage solide. Et la santé aussi. Je ne suis évidemment pas le seul dans ce cas. Mais ma peur, c'est surtout ce que la remise en cause de la diversité en radios sous-entend : nos chansons, que nous essayons de faire belles, que nous souhaitons quoiqu'on dise, accessibles au plus grand nombre, ont-elles droit à l'existence ? Avons-nous vocation à ne créer des musiques que pour alimenter des publicités de voitures et les playlists de certaines radios mis à fond dans les commerces de restauration rapide ? Si j'ai signé, c'est que je pense que nous valons plus, bien plus que ça, qu'il est temps de le rappeler. Au fond, je m'étonne que nous ne soyons que « 1800 » artistes à avoir signé. Cela me paraît bien peu, compte tenu du nombre de chanteurs en France. Est-ce la peur de s'engager ? Car signer une telle pétition c'est vraiment un acte d'engagement. Ce n'est pas simplement une question de porte-monnaie. Il s'agit aussi de Culture, à laquelle les artistes que nous sommes apportent leur apport. Pour la rendre vivante, et non simple objet sonore en toile de fond. Pour maintenir ce dynamisme, il faut préserver une diversité musicale déjà relative.

JANN HALEXANDER :
« SI LE GRAND PUBLIC NE RÉAGIT PAS, QUI LE FERA ? »
J’ai effectivement signé cette pétition que j’ai reçue de la Sacem le 9 juin. Habituellement je suis très méfiant vis-à-vis des pétitions, j’en signe rarement, même si j’en reçois régulièrement. Les pétitions parfois jouent sur l’émotion au détriment de la complexité d’une situation donnée, je pense. Ici, la pétition était plutôt claire. J’aurais pu ne me pas sentir concerné : je passe très peu en radios. A Table et Il est minuit Docteur Schweitzer ont bénéficié de quelques passages radios, mais en général c’est plutôt anecdotique, tellement anecdotique que lorsqu’ A Table a été diffusé sur France Inter, j’ai reçu des félicitations de collègues, ce qui m’a laissé très perplexe. Mais si je passe peu en radio, et je ne suis qu’un cas parmi d’autres, c’est parce que le nombre d’émissions musicales radiophoniques a drastiquement baissé ces vingt dernières années. Il en est de même d’ailleurs pour la télévision – un passage d’une heure sur TéléSud, comme ce fut le cas en 2015, ce serait quasiment inenvisageable à l’heure actuelle. C’est dire si les choses changent vite, trop vite et dans le mauvais sens pour les artistes. Le nombre d’émissions musicales baisse, il y a une concentration des monopoles et la diversité des playlists, déjà limite, baisse dangereusement. Si le grand public, capable de se plaindre de ce manque de diversité, hélas, ne réagit pas pour autant, alors qui le fera ? Ce serait tentant pour les artistes, connus, très connus, moyennement connus, peu connus, inconnus, de rester chacun dans son coin, en essayant de tirer profit de la situation. En clair : Chacun pour soi et la Chance pour tous. Mais j’ose penser qu’il y a urgence. Et c’est bien la Sacem, dont je suis membre depuis 2004 (j’ai débuté dans la musique en 2003) qui a envoyé cette pétition.
Si j’ai signé, ce n’est pas uniquement par peur de la baisse de la diversité des musiques à la radios. Cette baisse est déjà effective, elle est importante, j’en ai pris acte. Personnellement j’ai été amené à faire de ma vie d’artiste un mode de vie plus qu’un métier, tellement les mutations sont violentes, profondes et accélérées. Cela implique toute une organisation pour ne faire que ça et un entourage solide. Et la santé aussi. Je ne suis évidemment pas le seul dans ce cas. Mais ma peur, c’est surtout ce que la remise en cause de la diversité en radios sous-entend : nos chansons, que nous essayons de faire belles, que nous souhaitons quoi qu’on dise, accessibles au plus grand nombre, ont-elles droit à l’existence ? Avons-nous vocation à ne créer des musiques que pour alimenter des publicités de voitures et les playlists de certaines radios mises à fond dans les commerces de restauration rapide ? Si j’ai signé, c’est que je pense que nous valons plus, bien plus que ça, qu’il est temps de le rappeler. Au fond, je m’étonne que nous ne soyons que « 1800 » artistes à avoir signé. Cela me paraît bien peu, compte tenu du nombre de chanteurs en France. Est-ce la peur de s’engager ? Car signer une telle pétition c’est vraiment un acte d’engagement. Ce n’est pas simplement une question de porte-monnaie. Il s’agit aussi de Culture, à laquelle les artistes que nous sommes apportent leur apport. Pour la rendre vivante, et non simple objet sonore en toile de fond. Pour maintenir ce dynamisme, il faut préserver une diversité musicale déjà relative.

Au demeurant, que font les autres radios, France-Inter incluse, dont le quotas est, elle, radio publique oblige, d’au moins 50% ? Ce quota respecté à la lettre (pas de chance d’y entendre une chanson française de plus !) reflète-t-il pour autant la diversité de la chanson de ce pays ? Oh que non, nos lecteurs ne le savent que trop ! Ce volume de chansons est comme sous-traité par les gros labels, les majors, d’un formatage honteux qui n’a pas grand chose à envier à celui des radios commerciales.

Les radios commerciales sont vent debout contre les quotas : elles veulent désormais  les faire supprimer. 100% d’anglo-saxon à l’antenne, c’est leur rêve absolu, leur jouissance promise !

Le gouvernement est pour le maintien et exige, lui, une diversification des titres à l’intérieur des quotas (que ce ne soient pas toujours les mêmes chansons, ce qui, sans réelle définition de ce qu’est le champ de la chanson, ne veut pas dire grande chose). En contrepartie il est prêt à baisser les quotas de 40 à 35 %. Défaite donc.

A l’initiative de la Sacem, prise un peu au dépourvu, les artistes viennent de signer une pétition pour sauver la langue française. En un peu plus de 48 heures, la Sacem a rassemblé 1800 signatures d’artistes. Ce qui à première lecture est énorme mais, dans les faits, fort peu : l’essentiel des artistes dont NosEnchanteurs fait la promotion sont brillamment absents. Ça pose des questions. Le grand public, désinformé ou peu ou pas informé) hélas s’en fout. En ce moment précis s’en foot.

En ce domaine comme ailleurs, qu’il s’agisse de ventes d’armes, de commerce de médicaments ou de culture, le bizness n’a aucun scrupule. Les gens d’affaires tueraient père et mère s’ils ont la garantie de conforter leur compte en banque, si possible domicilié à Panama, car le bizness ne participe jamais à l’effort collectif. Qui plus est il n’est pas patriote.

La culture française, la richesse de notre chanson, peu leur chaut : c’est le cadet de leurs soucis. Si le chanson en anglais leur permet de vendre encore plus d’espace publicitaire à Coca-Cola, à MacDo et aux fournisseurs de couches-culottes et de pâtées pour chiens, mettons en plus encore. Les actuels quotas les en empêchent ? Alors supprimons les quotas ! Et s’il faut modifier la loi, les parlementaires le feront. Suffit de bien savoir leur parler, d’éventuellement leur graisser la patte.

Ça se joue aujourd’hui à la commission mixte paritaire du Parlement qui doit étudier les dispositions de la future « loi création » sur lesquelles le Sénat et l’Assemblée nationale n’ont pas réussi à trouver un accord. Ça se joue entre ces radios haineuses et ce gouvernement bien timide : c’est ce mercredi 15 juin que se joue une partie de l’avenir public de la chanson d’expression française sur les radios. Et c’est pas gagné !

 

1 800 CHANTEURS ET TOI ET TOI PAS MOI

1 800 chanteurs viennent de signer une pétition « Touche pas à mes quotas » à l’initiative de la Sacem. Artistes dont les médias retiendront bien sûr les noms les plus célèbres : Goldman, Cabrel, Aznavour, Biolay, Renaud, Duteil, Cherfi, Bertignac, etc. 1 800, mais pas tout le monde, loin s’en faut. De tous les artistes que nous défendons plus particulièrement au jour le jour, force est de constater, à de rares exceptions près, qu’il n’en figure pas beaucoup. Et ce sont, comme par hasard, des chanteurs peu habitués, voire carrément absents, des programmations des grandes radios (sauf dans l’émission de Philippe Meyer, avant qu’il ne soit viré…) qui ici manquent à l’appel. Faut-il pour autant considérer cette liste comme nulle et non avenue ? S’en gausser comme le fait le chanteur Jean-Michel Piton sur une page facebook publique : « Ah bon, il fallait signer où ????? je viens de lire la liste… mort de rire ! Au fait ce sont les quotas pour tout le monde qu’ils défendent ou bien leurs droits d’auteurs ??? » Piton laisse ainsi entendre que seuls certains chanteurs ont été contactés, les autres non. Ce qui est faux : il suffit de lire cette liste pour s’en rendre compte. La Sacem a fait parvenir cette proposition de signature le 9 juin dernier à tous ses sociétaires. Si tous l’ont reçue, bien peu ont donné suite. Si Benoit Dorémus, Jann Halexander (lire sa contribution pour NosEnchanteurs en encadré ci-dessus), Stéphane Cadé, Flavia Perez, Fred Radix, Luc Alenvers, Alexis HK, Romain Didier, Thierry Chazelle, Vincent Baguian, Clarika, Stéphane Zelten ou Gérard Morel l’ont signée et figurent ainsi dans la liste, c’est qu’ils l’ont reçue, comme tout le monde, dans leur boite mail. Il est malhonnête d’insinuer que seuls certains l’auraient reçue et pas d’autres. Confirmation nous a été donné, sans ambiguïté aucune, par le service presse de la Sacem.

Alors c’est vrai, nombre d’artistes peuvent se poser la question : pourquoi signer puisque de toute façon nous ne passons pas dans ces radios ni même à Inter ? Mais c’est là un autre problème encore, même s’il conviendrait aussi de répondre de manière satisfaisante à cette question. Le jour où il n’y aura plus de quotas, où tout sera dérégulé, où la chanson d’expression française n’aura plus de place sur les ondes, c’est sûr que ces chanteurs-là auront encore moins de chance d’y passer. Ne pas se tromper de combat donc, ne pas inverser les priorités.

7 Réponses à La Chanson française attaquée de tous quotas

  1. Catherine Laugier 14 juin 2016 à 22 h 15 min

    Dans les chanteurs d’expression, ou de variété, programmés (un peu) sur les radios qui ont signé cette pétition, il y a aussi Abd Al Malik, Axel Bauer, Alex Beaupain, Mathieu Boogaerts, Carla Bruni, Jean-Patrick Capdevielle, Alain Chamfort, Louis et Mathieu Chedid, Albin de la Simone, Dominique A, Thomas Dutronc, Michel Fugain, Yves Jamait, Michel Jonasz, Juliette, Kent, La Grande Sophie, Maxime Le Forestier, Linda Lemay, Gérard Lenormand, Enrico Macias, Maurane, Christophe Miossec, Nana Mouskouri, Pierre Perret, M Pokora, Oxmo Puccino, Véronique Sanson, Michel Sardou, Alain Souchon, Hubert-Félix Thiéfaine…

    Des chanteurs, auteurs, écrivains, paroliers, poètes, réalisateurs, musiciens, français ou étrangers, ont également signé, tels Pierre Barouh, Joël Favereau, Boris Bergman, Jean Fauque, Claude Mesles, Didier Barbelivien, Alice Dona, Chico Buarque, Marianne Faithfull, Rokia Traoré, Erik Orsenna, Justine Lévy, Marie Nimier, Viktor Lazlo, Bertrand Tavernier, Jean-Pierre Dardenne, Michel Legrand, Didier Lockwood, Giovanni Mirabassi, Jean-Michel Jarre, Marc et Pierre Jolivet, Jean-Félix Lalanne, Line Renaud, et même le dessinateur Plantu…

    Et dans ceux qui passent peu ou jamais sur les radios, on peut rajouter Nicolas Bages (Bacchus), Idriss El Mehdi Bennani, Philippe Chatel, Dominique Terrieu (Dimoné), Lili Cros, Joseph d’Anvers, Tri Yann, Guillo (Guillaume Galiana), Richard Gotainer, Philippe Lavil, Arthur Ferrari, Zaza Fournier, Manu Galure, Gréu Gari des Massilia Sound System, Luce, Luciole, Bastien Lanza, Christopher Murray, Gilles Roucaute…

    Liste non exhaustive. Et tous les auteurs et artistes moins connus qui ont aussi signé…

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  2. GILLES 15 juin 2016 à 2 h 12 min

    Et si « nos enchanteurs » relayait cette pétition pour que nous, les
    auditeurs, puissions également la signer?

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  3. Pierre 15 juin 2016 à 17 h 44 min

    Le projet du gouvernement, comme vous l’indiquez fort justement, prévoit de baisser le quota de 40 à 35%, mais en contrepartie d’une plus grande diversité des morceaux diffusés (car de nombreuses radios atteignent leur quota avec une dizaine de morceaux !!!). Ainsi, on ne prendrait en compte qu’un certain nombre de passages d’un même morceau dans la même journée. Ce qui obligerait les radios à diffuser plus de morceaux différents. Personnellement, je suis POUR ce projet.

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  4. Catherine Laugier 16 juin 2016 à 18 h 08 min

    La Sacem nous indique que les parlementaires ont adopté la solution de compromis proposée par le gouvernement :https://societe.sacem.fr/actualites/economie-de-la-filiere/quotas-radio–la-sacem-se-felicite-de-ladoption-dun-compromis-equilibre-par-les-parlementaires

    La liste des désormais 2000 artistes et personnalités du monde de la culture ayant voté cette pétition est consultable ici :
    https://societe.sacem.fr/actuimg/fr/live/v4/Createurs-Editeurs/Actualites/2016/2e_trimestre/Liste_signataires_petition_quotas_radio_16_06_2016.pdf

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  5. Catherine Laugier 16 juin 2016 à 20 h 52 min

    D’autres noms relevés dans la liste des 2000 signataires à jour au 16 juin :
    Jérémie Bossone, Isabelle Boulay, les comédiennes Nicole Calfan et Eva Darlan, Teofilo Chantre, Georges Chelon, Pascal Danel, Thibaut Defever (Presque Oui), Nicolas Driot (Kandid), Michel Drucker, le compositeur de musique Pascal Dusapin, Jacques Dutronc, Enzo Enzo, Daniel Fernandez, l’auteur Pierre Grosz, le producteur Rémy Grumbach, Sylvie Hoarau des Brigitte, Gilbert Laffaille, François Morel, Frédéric Nevcheirlian (Nevché), Patricia Petitbon, Olivier Rech, François Staal, Tryo, Louis Ville, Youssoupha, Julie Zenatti…

    Il reste à l’Assemblée et au Sénat à valider ce compromis retenu par la Commission des parlementaires.

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