Pascal Valy « Poon », 1967-2025

Pascal Valy, dit Poon (photo Karen PF)

C’est un lieu d’apparence discret, à Rompon, à peine mille deux cents habitants, sur la départementale 86 en direction de Privas, à l’entame de l’Ardèche. Sur le trottoir d’en face, juchée sur un poteau, une immense vache ailée, pour repère, pour totem. Mais depuis quelques temps, la salle « Si les vaches avaient des ailes / Espace Matthieu-Côte » était en pause, cause à la maladie du boss, celui que tout le monde surnomme Poon.

Poon, c’est Pascal Valy, d’aspect rondouillard, avenant, énergique, un type que d’emblée on prend en sympathie. Un copain. Il crèche au dessus de la salle, avec son épouse et ses gamines. Elle, c’est Mathilde ; la chanson la connaît sous le pseudo de Matildy. Parmi son répertoire, une Ode à Poon, amoureuse caricature qu’elle n’omet jamais de chanter à chacun de ses concerts.

Ce fut la chronique d’une mort annoncée, saloperie de cancer qui l’a pris à la gorge. Et nombre de ses amis lui ont rendu visite dans sa chambre d’hôpital, à l’unité de soins palliatifs de Privas. Poon est décédé au matin d’une importante journée de contestation syndicale. S’il n’avait pas été occupé à mourir, entravé de perfusions, presque le corps nu, il aurait manifesté lui-aussi, comme d’hab, en fanfare, en chansons révolutionnaires ou, les bières aidant, paillardes. Le fournisseur de bière ne fut pas le même.

Poon, c’est l’histoire d’un parigot qui déboule chez les Canuts à l’âge de 22 ans. Il y exerce des tas de boulots : cuisinier, serveur… Et beaucoup, beaucoup de bénévolat, principalement dans le milieu musical, au Kafe Myzik et ailleurs… Il fonde en 2003 l’association Lerockestpasmort et crée le Kraspek Mysik, sur la montée Saint-Sébastien à Lyon, en 2005. Puis le label Poon l’année suivante. On retrouve notre « révélateur du talent des gens » comme le qualifie avec raison son entourage, en de nombreux endroits, partout où l’éducation populaire, l’action culturelle, la musique particulièrement, et l’amitié l’appellent. Il est sur Pézenas, Tournon et ailleurs. Et se pose à Rompon qui, par son action, devient un lieu incontournable de l’agitation culturelle en Rhône-Alpes (citer les artistes y ayant été accueillis serait bien fastidieux) et un singulier repaire de cette indéfectible amitié qui irrigue par Poon. Ce n’est certainement pas pour rien si la salle est baptisée au nom de Matthieu Côte, ce jeune chanteur lyonnais bourré de talent, injustement fauché en 2008 en début d’une carrière prometteuse. Car, parmi les qualités de Poon, la fidélité ne comptait pas pour rien.

Lieu de concerts et autres spectacles certes (merci encore, Pascal, de m’y avoir programmé), lieu d’expo aussi, les cimaises toujours exposant l’original, l’incongru, la beauté. Et l’humour, une autre de ses qualités et pas des moindres, qui aura accompagné le bonhomme jusqu’au bout, jusqu’à son lit de mort. Sur les réseaux sociaux, nombre de ses copains lui rendent d’ailleurs cette politesse de l’esprit, ces saillies que plus que tout autre Poon appréciait : il doit se tordre de rire dedans son cercueil qui, sous les assauts, ne peut rester de bois. « L’enfoiré ! Sa dernière blague, ça va être de nous regarder mort de rire parce qu’il aura réussi à tous nous coller à l’église ! » commente une de ses amies, sur facebook.

Ses obsèques se dérouleront ce jeudi 25 septembre 2025 à 14 h 30 en l’église Saint-Vincent de La Voulte-sur-Rhône. Puis célébration, dans la joie, dans sa salle, à Si les vaches avaient des ailes.