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Thomas Pitiot dans la cour de récré

E1540-1nfant, rien n’est compliqué : c’est ensuite que ça devient pas simple, que notre esprit devient poreux aux peureux. Dans la classe, il ne peut y avoir d’étrangers aux yeux des enfants : il n’y a que des autres enfants, comme eux. C’est après que le racisme s’insinue et gangrène, qu’il réduit la taille du cerveau souvent à la dimension de celui des parents, d’un pois chiche, d’un limaçon ou d’une virgule s’ils sont frontistes : « Tout l’monde a peur, tout l’monde a peur, tout l’monde a peur / Et un monde où tout l’monde aurait peur / ça fait trop peur / Même pas peur de la peur, on a même pas peur… »

« Dans ma classe il y a Zakaria, Marina, Léa / Mourad, Mokim, Eddin et aussi Alexis et Kevin / Amine, Arthur, Achille, Agathe, Alphonse / Ismaël, Naofel, Anaïs et Nawelle / Sans oublier Lorenzo, Hugo et Bernardino ». L’école de Thomas Pitiot ne triche pas avec la carte scolaire : elle est pour le moins diversité. Elle est sono des quartiers quand bien même la petite musique qui rassemble plus encore est « celle du marchand d’glaces qui vient juste d’arriver ».

Chez Pitiot, tout le monde, toute la planète, parle à l’unisson. Uniformisation ? Non ! Si les codes sont bien souvent les mêmes (même les animaux se mettent au verlan, le parler et le braire à l’envers), les cultures se juxtaposent, s’additionnent, s’enrichissent. Sans être ni un catalogue de mentalités, de faits, de discriminations, à d’urgence corriger ni un truc lourdement moralisateur, ce disque (qui est aussi, vous vous en doutez, un spectacle – que notre consœur Catherine Cour vous a relaté en juillet dernier, lors du Off d’Avignon) est d’une actu brûlante. Parce que le vivre ensemble est le premier dégât collatéral de notre mal de vivre, de cette société bien trop libérale, égoïste, pour se soucier des autres.

Pitiot se contente de se glisser dans la peau, aux diverses couleurs, des enfants de cités. Dans leurs préoccupations quotidiennes. Faut-il avoir gardé son esprit gamin, toujours est-il que c’est remarquable de justesse. L’observation, l’écoute, sans doute. Car il n’y a pas que le vivre ensemble, il y a les préoccupations de tous les jours. Comme le passage en sixième qui va bien finir par venir, ces filles qui jouent au foot « mieux que toi », les bisous de Mamie Jeanne qui glisse au passage des secrets dans l’oreille, le Grand carnaval qui passe au coin de la rue,… Et la petite Balakissa, de Bamako, qui aimerait tant faire du ski : jolie chanson en noir sur blanc.

Pas de différence entre Thomas Pitiot qu’on connait et celui-ci, si ce n’est que le propos est adapté au jeune public. Les valeurs sont bien sûr les mêmes, fragrances et origines réunies en un même bouquet fait de plein de couleurs, de notes et d’instruments (balafon, tama, cuica, bruitages, guitare, batterie et percussions, glockenspiel, djembé…). Propos de bon sens, comme quand la vérité sort de la bouche des enfants. Les parents feraient bien d’écouter ces chansons-là, de danser dessus. Le public habituel de Thomas Pitiot ne doit surtout pas se priver de ce nouvel album tant il s’inscrit naturellement dans l’oeuvre de l’artiste. Fruitée et généreuse, universelle.

 

Le site de Thomas Pitiot, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.

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