Baptiste W. Hamon, sur sa route de Memphis

Baptiste W.Hamon Photo ©Romain Winkler

« Avance, avance, avance, ne retiens pas ta peine / La nuit, c’est fait pour épuiser les poèmes ». De jolis mots pour le refrain d’une chanson mélodieuse, tout en mélancolie porteuse d’espoir. Le morceau se nomme Jusqu’à la lumière. C’est aussi l’intitulé du troisième album de Baptiste W. Hamon.

Belle expérience que ce disque. Qui, en guise d’apéro, nous annonce Boire un coup et offre comme pousse-café une reprise inattendue d’un titre de Jacques Bertin, Revoilà le soleil. Passer d’une chanson de fête et d’alcool, dans le droit fil d’une certaine tradition gauloise teintée de misogynie, à l’emphase du poète patriarche, c’est assurément exécuter un grand écart inédit.

et aussi BARBAGHAMON
En septembre 2021 sortait le sept titres issu de la collaboration Hamon-Barbagallo. Ces deux là, ponts entre la vieille Europe et l’Ouest américain ou australien, ne pouvaient que s’entendre pour cet album qui chevauche les grands espaces entre folk romantique et pop étincelante. Si le souvenir brillera est une adaptation partiellement bilingue de Sleep the clock around assez pop, le reste de l’album est un ensemble de ballades flamboyantes et romantiques où l’on ne distingue guère les deux auteurs-compositeurs, qui alternent ou fusionnent. Après « la voile grande » de J’écoute l’eau, mis en musique par Barbagallo, Ils fument « La cendre glisse dans le verre / Vidé du vin d‘orange amère » est un superbe titre mélancolique d’Hamon sur une séparation attendue, alors que Le jour viendra « Elle a une voix d’ange qui chante à l’infini / Quelques mots d’espérance qui riment avec ma vie » (Barbagallo) est chanson d’amour et d’espoir, de même que cette supplique à Maria (Hamon), recherche de paix et de bonheur. Si le titre et la pochette de l’album évoquent le jeu du Backgammon, c’est plus à l’amour qu’au hasard que se raccrochent les deux artistes pour délivrer un message positif : « Passe, passe, passe / Le temps / Qui blesse / Passe, passe, passe / Pour qu’enfin / Tout renaisse », et il aurait tout aussi bien pu s’intituler Le ciel bleu, du nom du titre qui clôture ce superbe album.
Catherine LAUGIER

L’univers musical de Baptiste W. Hamon n’en est pas moins insolite, de ce côté de l’Atlantique en tout cas. Son inspiration, l’artiste tricolore va en effet la chercher au pays profond de l’oncle Sam, dans cette musique country des Kris Kristofferson et Merle Haggard. Pas étonnant dès lors que, par moments, cet album puisse rappeler aux anciens les disques d’Eddy Mitchell concoctés sous la houlette de Charlie Mc Coy, ou le méconnu Blue country de Joe Dassin. De quoi donner à ses chansons un parfum bienvenu d’intemporalité, bien que la sobriété de mise dans les arrangements en fasse paradoxalement une œuvre totalement empreinte de modernité. La production étant assurée par le grand John Parish (encore récemment derrière la réussite éclatante du dernier album d’Emily Loizeau), on ne s’étonnera guère de frôler l’excellence.

Sous nos oreilles défilent donc dix chansons, tantôt légères et flirtant avec la pop (Dorothée), tantôt graves pour nous conter des amours en voie de disparition (Ils fument, déjà dans Barbaghamon, en duo et dans une orchestration différente), les désillusions sentimentales (Les gens trompés) ou l’espérance de la passion (Je m’abandonne à toi). Pas de lyrisme forcené, mais un ton doux-amer, qui trouve sa parfaite résonnance dans ces musiques sans esbrouffe, magnifiées par les arrangements subtils de John Parrish.

L’univers country-folk de Baptiste W. Hamon brille par sa singularité dans le paysage de la chanson française actuelle, où la pop colorée se taille la part du lion. Des chansons discrètes, presque secrètes, qui ouvrent grand les portes de l’imaginaire, vers des contrées de liberté aux horizons infinis. Prenez votre ticket, le voyage sera beau.

Pol de GROEVE

Baptiste W. Hamon, Jusqu’à la lumière, Soleil Bleu/Manassas/modulor, 2022. La page facebook de Baptiste W. Hamon, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là.
La page facebook de Barbagallo, c’est ici ; ce que Nosenchanteurs en a déjà dit, là. 
Baptiste W.Hamon est en tournée de concerts, ce soir à Sète, le 13 juillet aux Francofolies de La Rochelle.

Dorothée, clip
Je m’abandonne à toi, concert au Silex 
Le souvenir brillera, Barbaghamon, avec Barbagallo 
Nous nous reverrons, Barbaghamon, Barbagallo, audio