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Carine Achard, colères d’un monde éparpillé

 

Carine Achard (photo Claire DAO)

Carine Achard (photo Claire DAO)

Pourquoi chanter ? Chante-t-elle à l’entame de son quatrième opus, qui se veut couvre-feu : « J’attends, j’attends, de retrouver / L’écho, l’écho des sourires flous / Mais je n’entends que les regrets / Et les colères d’un monde éparpillé. » La chanson-titre qui suit parle aussi de colères : « Ça bouchonne dans mes veines / Le grand embouteillage… »

C’est un disque aussi étonnant que franchement séduisant, à mille lieux de la production actuelle. Très proche dans l’art et la manière – de certains instruments aussi – d’une inspiration traditionnelle, baroque, style Cécile Corbel ou Clannad, et des notes qui parfois osent des sonorités rock. Les textes sont aussi riches et bavards que les musiques, c’est dire si notre ouïe est sollicitée en tous sens, si chaque vers, chaque portée est délectable surprise.

Certes, vu ses antécédents (deux albums, un ep), Carine Achard ne devrait pas être une surprise pour l’amateur du genre : c’en est tout de même une, qui plus est fameuse, qui nous dit que la chanson n’est pas unanimement uniformisée, aseptisée. Son Couv(r)e feu fait bouillir le chaudron dans lequel mijote plein de choses : « ce qui fait mal, ce qui révolte, ce qui bouleverse et submerge, d’un coup trouve un sens. Les non-dits qui serrent le ventre se faufilent dans un murmure puis s’envolent »

CD Carine AchardNous sommes ici dans l’intime d’une femme autant que dans le public des émotions, des respirations, des doutes, des aspirations. Dans l’ombre et la lumière, les craintes présentes et à venir, et forcément l’espoir sinon elle ne chanterait pas. Chansons étranges dont il nous faut nombre d’explorations pour les faire siennes. C’est en cela qu’elles semblent réussies : une chanson qui se dévoile complètement dès la première écoute est forcément suspecte, je n’ose dire vide. Là nous sommes dans les pleins et les déliés d’une élégante créatrice, ses folies, ses désirs, même charnels : « Ouvrez au nom de mon cul / Prenez-moi entière / Avant que dame vertu m’enterre ». Au titre suivant, Carine fait même, à sa manière, l’éloge de la transsexualité : « Je suis transextraordinaire / N’en déplaise aux esprits malades / N’en déplaise aux impénétrables ». Personnage résolue, elle se permet même d’interpeller, presque rudoyer, celui d’en haut, en un Notre Père bien plus convaincant que l’original : « Pardonne-toi mon enfance / Comme tu as pardonné / A ceux qui ont enfanté / Tes errances… »

Treize titres pour un opus qui, s’il agit sur vous, vous emmènera en des heures d’écoute, en partance pour des chansons qui ne sont pas sans raison, qui ouvrent d’enviables pistes et de possibles conversations.

Achard est une des bonnes nouvelles de la chanson : c’est sacrément encourageant.

 

Carine Achard, Couv(r)e-feu, Charad Production/EPM 2023. CD à sortir prochainement. Le site de Carine Achard c’est ici.

 

« Pourquoi chanter ? » : Image de prévisualisation YouTube

2 Réponses à Carine Achard, colères d’un monde éparpillé

  1. Christophe 26 juin 2023 à 2 h 06 min

    Sublime album ❤️

    Répondre
  2. Brian Thompson 4 juillet 2023 à 14 h 26 min

    J’ai tout récemment découvert Carine et l’ai programmée dans « French Toast » pour ce mercredi 5 juillet, sur wmbr.org (archivée pendant 15 jours). Merci de cette belle chronique!

    Répondre

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