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Off Avignon 2022. Damei-Klingler, Dalida, la Callas des variétés

© Julien Truchon

Dalida sur le divan © Julien Truchon

22 juillet 2022, 95-Au Verbe fou, Avignon, Lionel Damei, Alain Klingler, Dalida sur le divan


Dalida sur le divan, drôle de titre pour un spectacle. Pour un livre, en fait. « Le voyage le plus merveilleux, ce n’est pas celui que l’Homme fait en allant à la Lune. C’est le voyage intérieur » a dit Dalida à Denise Glaser, en 1972. C’est ainsi que le psychanalyste Joseph Agostini présente le livre qu’il a écrit en 2017 sur la personne et la carrière de Dalida.

Le pianiste Alain Klingler et le chanteur Lionel Damei, comédiens, chanteurs, danseur pour Damei – l’occasion de danser sur Le lambeth walk, Tico Tico ou Besa me mucho – donnent vie sur scène à cette introspection psychanalytique, tant qu’on ne sait plus si c’est Damei ou Klingler qui sont Dalida. Certes Klingler joue le rôle du psychanalyste, et Damei EST Dalida, sans perruque, suggérant plus la diva par l’âme qu’il met à l’interpréter que par un quelconque déguisement. On s’en tient donc à un costume entre queue de pie et toge, un trait de kohl sur les paupières, un clip d’oreille pour la féminité. Le regard danse un instant, suggère furtivement le léger strabisme qui subsistait chez Dalida, à la suite d’une infection oculaire infantile. Le reste est dans l’imaginaire, le boa ne fait que de la figuration. On était rentré dans le jeu de celui qui était Barbara, on replonge avec lui dès la première seconde dans l’âme de Dalida.
Les deux comédiens s’amusent à reprendre les chansons de Dalida, à se répondre, à échanger leurs rôles en quelque sorte, et que ce soit l’un ou l’autre c’est toujours Dalida qui nous parle, dans cette conversation à bâtons rompus, presque celle de deux amis.

DAMEI KLINGLER 2022 DALIDA SUR LE DIVAN DANSEAvec retenue chez Klingler, Bambino ; Parle plus bas «  Le monde n’est pas prêt pour nous / Il dirait tout simplement que nous sommes fous » ; Pour ne pas vivre seul
Contenu, pour quelques extraits ponctuant ses confidences, ou tout en lyrisme, lorsque Damei conte ses amours tragiques. Ciao amore, ciao, « La solita strada », la chanson qui porta malheur à son grand amour Luigi Tenco, suicidé pour un concours perdu. Ou celui qui inspira Il venait d’avoir dix-huit ans, et l’enfant qui n’en est pas né.

L’occasion d’aborder l’artiste avec des références littéraires et philosophiques insoupçonnées, de découvrir plusieurs chansons moins connues et l’immense diversité de son talent, de la chanson légère à la poésie, du disco au show glamour. Et surtout l’incroyable destin de la femme, la « Callas des variétés ». Qui partage avec celle-ci la passion, le travail, le perfectionnisme, le tragique d’une vie d’amours contrariées, l’Italie et l’Orient…

On n’entend fugacement Dalida que pour un bref extrait d’interview en fin de spectacle, et en musique d’introduction Avec le temps, de Ferré, pas étrangère à la vocation de psychanalyste de Joseph Agostini. Devant sa glace Damei fait chanter l’artiste, s’interrogeant sur ce qu’elle est réellement « A ce reflet qui me remplace / Tu jurerais que que je suis là. » La chanson évoque discrètement Van Gogh et son champ de blé « [Où] j’ai croisé des aigles / Et je croyais leur ressembler » (Nuits d’absence, Caussimon / Ferré ) et revient en leimotiv dans le spectacle.

DAMEI LIONEL 2022 Dalida sur le divan afficheLa consultation du psychanalyste commence lorsque Youssef Chahine propose à Dalida le rôle principal du film Le sixième jour, en 1986 d’après le roman d’Andrée Chedid. Un personnage très différent de celui qu’elle incarne sur scène, puisqu’il s’agit d’une (grand’) mère courage, femme de tradition confrontée à une épidémie de choléra. « Après le sixième jour, soit on meurt, soit on ressuscite ». Chahine lui suggère de chercher dans ses souvenirs les épreuves qu’elle a vécues pour les retranscrire dans son jeu.
Le psychanalyste l’aide à se retrouver tout en la mettant en garde contre le danger qu’il y a à revivre les moments les plus douloureux. C’est que les auteurs de Dalida semblaient lire en elle à cœur ouvert, vision prémonitoire ou prophétie auto réalisatrice… Quand Klingler chantera
« Le soir où je m’en irai, je le ferai à ma manière », de sa belle voix grave, en nuances, sans les orchestrations des années 80 mais avec son piano profond et expressif, la chanson prend une puissance nouvelle…

Le puzzle se reconstitue peu à peu. Trois de ses amours se suicideront, le premier quasiment dans ses bras. La jeune actrice ambitieuse qui signait d’abord Dalila, comme la femme fatale de la bible, puis la chanteuse, doit se battre, toujours se battre, résister aux yéyés. « Pour être une star, il faut donner sa vie ». Le succès et les passages à vide. La mort qui frappe à plusieurs reprises, qui la refuse lors de ses tentatives d’en finir. Malgré elle Dalida joue la tragédie de sa vie.  Son dernier rôle dans le film de Chahine est salué par la critique…

Damei lui a dédié cette magnifique  Soleil de cendres  qui dépeint si intimement toute sa destinée « Show must go on…dans le cosmos ».
« Après le sixième jour, je me reposerai de tout… »

 

La page facebook de Lionel Damei, c’est ici. Ce que NosEnchanteurs en a déjà dit, là. Le profil facebook d’Alain Klingler, c’est ici.  Ce que NosEnchanteurs a déjà dit de Klingler, là.  
En concert le 28 octobre à La Pléiade à Allevard-les-bains et le 29 octobre à Bernin (Isère) et puis Chartres, Arcueil, Villarbonnot, et en Corse.

 

Dalida sur le divan Teaser Off Avignon 2022 Image de prévisualisation YouTube

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