Bruno Brel, 1951-2025

Bruno Brel (photo de presse non créditée)
Si, par un petit filet, la presse relate sa disparition, elle risque de ne retenir de Bruno Brel que sa parenté avec Grand Jacques. Si elle dispose de quelques lignes de plus, peut-être fera-t-elle mention qu’il fut aussi chanteur, citant quelques de ses chansons parmi son ample production, qu’il fut écrivain, nouvelliste et essayiste, sportif de surcroît.
Le nom de Bruno Brel sera toujours pour moi associé aux articles de Michel Trihoreau sur Paroles et Musique puis sur Chorus : c’est lui qui en parlait, le défendait avec conviction. Moi l’existence d’un autre Brel me dérangeait, m’irritait : il ne pouvait y en avoir qu’un. J’étais stupide. Je n’ai pas dû être le seul à me dire ça ; ça n’a pas dû être simple pour Bruno.
Jusqu’au jour où, dans ce temple de la chanson qu’est la petite salle de Viricelles, pas loin de chez moi, j’ai rencontré ce chanteur. Là, devant nous, c’était bien plus qu’un neveu, mais un grand artiste, immense même. Bien sûr, la voix, l’accent, la belgitude, certains tics de langage… comme disait maman, les chiens font pas des chats. Je me suis excusé auprès de lui le concert fini, excusé de l’avoir ignoré, jusqu’alors refusé. Nous sommes devenus amis, fidèles. Au fil des décennies, les rencontres et l’actualité de l’un ou de l’autre ont nourri ce dialogue. Ses disques et surtout ses bouquins pèsent leur poids sur mes étagères.
Bruno Brel était un artiste en entier, en combat sur scène comme au quotidien : pas facile de s’appeler ainsi, de porter le nom d’un bien plus illustre que lui, quand on est trop fier pour se farder d’un pseudo, pour s’y cacher. Sauf que lui n’a « jamais battu monnaie » en exploitant la raison sociale de « Brel ». La preuve, il est resté dans l’ombre, en modeste artisan.
Bruno est né dans la province de Brabant. Combien de fois a-t-il raconté, il l’a écrit même, que c’est son oncle Jacky qui, paniqué, a conduit la belle-sœur à la maternité dans la voiture de l’entreprise… Bruno avait, depuis ce jour, des tas de souvenirs qui le lient à Jacques. Des souvenirs et intimités couchés dans le livre Le Neveu de mon oncle aux éditions Café de la rue, dans le livre Brel co-écrit avec Héran dans la collection Plume et Pinceau aussi (un volume forcément très personnel de cette bien belle collection).
Jeune adulte, Bruno a regardé le monde derrière les mêmes fenêtres de la cartonnerie familiale, il a dû y voir les mêmes choses, nourri la même envie, cette folle idée de chanter, d’abord dans des cabarets et boites de Bruxelles puis à Paris, dans l’environnement de Canetti. Puis dans presque le monde entier : trente-cinq pays, sans les imposantes trompettes de la renommée.
Longtemps, malgré son blase, Bruno n’a jamais voulu chanter que du Bruno. A écouter des chansons telles que Les Émigrants, Ma fille ou La Rivière Bambou, on comprend pourquoi. Dans un répertoire très « cabaret », l’émotion alternait avec des titres plus légers, humoristiques, parfois railleurs : l’empreinte Brel. Puis Bruno a cédé aux amicales mais pressantes demandes et a fini par mettre du Brel dans son Brel : il mêla le répertoire familial, une maille à l’endroit, l’autre à l’envers. Tendresse et tonitruance, héritage et descendance.
Discographie contrariée : si ce n’est les deux premiers albums, griffés Jacques Canetti, Bruno s’est souvent auto-édité, pas toujours avec beaucoup de moyens. D’autant que le bonhomme ne fut pas que chanteur mais mena plusieurs vies, toutes nourries d’une égale passion. Ainsi celle de champion de moto-cross. Puis celle d’écrivain qui s’est ajouté puis récemment substitué à sa réalité de chanteur. Doit-on vous le dire : sa production littéraire est, sinon de premier plan, au moins de belle tenue. C’est un auteur solide qu’il vous faut découvrir. Son ultime livre, L’île morte, est paru en 2022, à l’enseigne de son propre label, P’tit loup Productions. « P’tit loup », c’était son expression. Je la garde précieusement en mon cœur.
Merci pour cet article très juste ! Dommage que tout au long de sa carrière, après l’époque Canetti, il n’ait pas été plus médiatiquement soutenu !
Merci pour ce bel hommage.
Je l’ai découvert grâce à la médiathèque de mon CE et ai partagé cette découverte en famille.
Nous avons eu l’occasion de recevoir à deux reprises ce grand artiste au niveau chansons et écrivain.
Même s’il avait 73 ans, il est parti beaucoup trop tôt.
Au revoir Bruno.
Bruno était une personnalité très attachante avec qui j’ai partagé énormément de souvenirs. Je souhaiterais également épingler son roman « La Marchande de bonbons ».
Il y raconte l’histoire d’une dame de ma région (Tournai). Toute menue, toute frêle, Bruno avait fait sa connaissance par hasard. Il décrit dans son roman la vie extraordinaire de cette petite dame qu’il finira par la surnommer… tante Simone et qu’il continuera à aller lui rendre visite jusqu’à la fin de ses jours.
Merci pour l’hommage que vous rendez à cet ami d’enfance.
Nous avons partagé nos premiers accords de guitare, les premiers concerts, les premières bêtises, les fous rires, les premières cigarettes en cachette. Sacré Bruno !
Il maîtrisait si bien « son » Bruxelles et sa belgitude et savait les faire apprécier au travers de ses textes.
Dommage de partir si tôt, l’ami. Tu avais certainement encore plein de choses à nous dire.
Bonjour
C’est avec une grande tristesse et stupéfaction que j’apprends le départ de Bruno
Je l’ai connu par le sport avec ses chiens quand il participait au canicross et canivtt
Je présente toute mes condoléances à ses proches et amis
Bien sincèrement