Bédoin 2025. Bressy, arroseur de fleurs et cueilleur d’étoiles

Jean-Sébastien Bressy à Bédoin (photo Bruno Rumen)
18 avril 2025, festival La Chanson d’abord, Bédoin,
« Je cherche des mots / Des mots complices / Secrets et mutins… » Première soirée festivalière quelque peu clairsemée et c’est bien dommage. Car, venu en presque voisin (de le proche ville de Pernes-les-Fontaines), Jean-Sébastien Bressy est un artiste entre tous étonnant. Qui plus est épatant. Je vous dit ça en me plaçant du côté du public, ce que je suis au moins le temps de chaque concert, présentement à savourer chaque chanson de cet artiste qui aime à se présenter pour l’indien qui est en lui, un peu comme ceux qui « prendront leur revanche / Pour montrer à ce monde usé / Qui sont les plus civilisés ». Pas du côté du critique que je suis aussi car, là, Bressy m’est constante et séduisante énigme. Il est en lui-même autant ou presque de chanteurs qu’il a de titres dans son répertoire. Et, seul à son piano donc libre de chanter ce qu’il veut, change son répertoire au gré de ses humeurs scéniques, bousculant sa set-list, sortant de son chapeau par ci par là des chansons qu’il n’y pas interprétées depuis des lustres, s’étonnant presque d’incidemment les retrouver.

JEAN-PAUL BONFILS LAURÉAT DES SCENES OUVERTES
Tremplin passionnant étalé sur trois soirées : trente titres et six jurés pour départager dix candidats fort disparates, ça nous donne dix propositions intéressantes, parfois insolites, toujours curieuses. Félicitations au lauréat Jean-Paul Bonfils (qui gagne une journée d’enregistrement), qui aime à se présenter comme « chanteur utile » et présente en temps normal un « cabaret thermodynamique, structurant, néguentropique, nietzschéen et ionesquien » ce qui n’est pas rien : très belle écriture, des compos d’un humour limite macabre et des bruitages aussi incongrus que franchement réussis. Citons, pour mémoire, les neuf autres artistes, duo ou groupes en lice : François Cesaria, Antoine Lentini, fanFan, Focalm, José Bonnano, L’Un et Lune, Robert Nicollet, Les Placides animés, Ophelia.
Il est romantique la chanson d’avant, sarcastique à l’instant (oh, cette chanson où il ne voit dans les élus de l’Assemblée nationale que bœufs et moutons !), prophétique plus tard. On peut l’envisager en chanteur de variétés (ça nous changerait du tout venant, du tout chantant), en musicien classique (très beau titre en hommage à son idole qu’est Ludwig Van Beethoven, « locataire de mes pavillons auditifs »), en un « de la rive gauche », en un militant de causes humanitaires et environnementales : il est tous les genres à la fois et échappe de fait à toutes les classifications. Avec ce petit aspect suranné que ruinent son dynamisme, son sourire et son accent du midi… A l’entendre, il est aussi bien d’autres personnages, « arroseur de fleurs, cueilleur d’étoiles / guetteur d’arc-en-ciel le cœur battant / frotteur de lampe, ouvreur de voile / semeur d’épice ou de piment / pourfendeur d’ennui, fendeur de brume… » A l’écouter, les yeux dans les yeux, on le croit effectivement capable de tout.
Artiste épatant, parfois en scène avec ses propres chansons, souvent musicien d’accompagnement, il mène un parcours à la marge même de cet art qu’il incarne pourtant si bien. Ses chansons, redoutablement bien construites, aspirent cependant à plus d’ampleur : on rêve de le voir sur une grande scène, avec un piano bien plus grand que lui et des musiciens qui plus encore peaufineront ses mélodies.
Le site de Jean-Sébastien Bressy, c’est ici ; ce que NosEnchanteurs a déjà dit de lui, c’est là. Le site de Jean-Paul Bonfils, c’est ici.
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