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Ta liberté de voler

S’il est un sujet auquel je suis particulièrement sensible, moi à qui on demande en permanence des articles gratuits en oubliant que c’est un travail et que ce serait bien que je puisse bouffer et nourrir du même coup ma famille, c’est la juste rémunération des artistes. Et c’est vrai que piller des musiques ou des films sur le net sans jamais rien payer, c’est se préparer des lendemains qui déchantent singulièrement. Si vous pensez qu’on peut vivre de l’air du temps, sans rien ni dans le ventre ni dans le porte-monnaie, passez votre chemin. Ou alors travaillez vous-mêmes, à l’usine comme au bureau, mais bénévolement. Et négociez le cas échéant des délais de paiement, des arrangements, avec votre boucher, votre boulanger, votre chauffagiste, votre supermarché de proximité, des arrangements… Moi je ne sais pas faire.

Tout travail mérite salaire. Vous aimez un chanteur : payez-le, ne le pillez pas ! Qu’il se nomme Elton Jones ou Rémo Gary, c’est son boulot, son gagne-pain. Comment peut-on écouter un chanteur qu’on ne respecte pas, à tel point qu’on lui vole son travail ?

Connaissez-vous Les rois de la Suède (photo ci-dessus), seule noblesse qui ne soit pas chroniquée dans les colonnes de Point de vue Images du Monde ? Ce groupe se situe dans une mouvance proche des Fatals Picards, tant il est vrai que ce groupe a été co-créé, il y a trois ans, par Ivan Callot, ex chanteur et parolier des Fatals Picards, et Monsieur Poulpe. Là, pour leur plus récente chanson, et dernier clip en date (mis sur le net depuis hier seulement), Ta liberté de voler, nos Rois de la Suède font forts. Et attaquent bille en tête les téléchargeurs. Jusqu’à se retrouver à poils en bout de chanson. Leur présentation : « A l’heure où le parti pirate suédois vient d’acquérir le statut d’église fondée sur le culte du partage gratuit de la culture et où la fermeture d’un site illégal ayant permis à un escroc notoire de devenir milliardaire sur le dos (car il ne peut plus dormir sur le ventre) des créateurs provoque pleurs et hystéries chez les ados du monde entier, on se demande si le monde n’est pas devenu fou et on se dit qu’il est temps que quelqu’un réagisse. »

Une bonne chanson vaut mieux qu’un long discours. En voici la preuve, « Ta liberté de voler » :

Tu nous as juste appris que ce qui n’est pas physique est gratuit
Qu’on peut faire un beau refrain avec une marque de spaghetti
On n’est plus des chanteurs, on est fier d’être des artistes SFR
Pour toi les mp3 sont trop reuch
mais tous les ans tu changes ton Iphone tout neuf
Des belles baskets faites par des enfants
là t’es prêt à mettre deux cents euros dedans
Chaque mois à Megaupload tu lâches un loyer
Car pour pouvoir voler t’es prêt à payer…

Ta, ta liberté, ta liberté de voler

Avec tes principes à deux balles
t’arrête pas là fais moi la totale
Viens te servir chez moi
viens t’essuyer dans mes draps,
Mais j’y pense, vu qu’on partage
je peux aussi venir chez toiImage de prévisualisation YouTube

15 Réponses à Ta liberté de voler

  1. Norbert Gabriel 23 février 2012 à 14 h 59 min

    Comment ça mécréant que vous êtes, vous ne croyez pas dans la parole de l’évangile sur les oiseaux qui chantent et Dieu qui pourvoira à leurs besoins sans qu’ils aient besoin de RSA ou de prime pour l’emploi ? Et le catéchisme ? ça a servi à quoi ? être payé pour faire de la musique ou pour chanter, et pourquoi pas aussi être payé rendre les gens heureux, ou essayer…? Etre payé pour fabriquer des armes, oui, mais des chansons… Rêveur !
    Toutefois « Chanson pour l’auvergnat » serait un des tops dans la play list d’un candidat tout neuf… On n’est jamais à l’abri d’une bonne nouvelle…
    (sauf si l’auvergnat en question est Hortefeux, mais le pire n’est jamais sûr non plus)

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  2. Nicolas Esprime 23 février 2012 à 15 h 46 min

    « Un texte à prendre au premier degré ? »
    http://www.numerama.com/magazine/21782-ta-liberte-de-voler-une-chanson-contre-les-pirates-et-pour-hadopi.html

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  3. michawicha 23 février 2012 à 16 h 27 min

    Celui qui à écrit cet article n’a pas compris la chanson car ce n’est pas du premier de degrés ! Comme toute leurs chansons !

    Réponse : A supposer (mais ça arrange bien de dire ça) que cette chanson ne soit pas à prendre au premier degré, en quoi ça change ? Quand on vous pique votre oeuvre et donc le paiement de votre oeuvre, comment vous acheter de quoi remplir votre assiette, nourrir vos gosses, mettre de l’essence dans la bagnole, payer votre loyer, vos charges etc ? Si dès demain je vous saisis votre salaire (voler les droits des auteurs revient strictement au même, que vous le vouliez ou non) comment réagirez-vous ? Vous ne serez pas content, je pense. Sachez, nom de dieu, que les artistes sont des êtres comme les autres, qui ne vivent pas que d’amour et d’eau fraîche !
    Quand les Fatals Picards (cousins, s’il en est, des Rois de la Suède) chantent
    « La Française des jeux » ou « La Sécurité de l’emploi » c’est du second degré aussi ? Si vous le pensez, ce que vous ne comprenez rien à rien. Regardez les choses en face, que diantre ! Si vous consommez de la viande, payez-là ; si vous consommez de la musique, payez-là. Ou elle disparaîtra parce que les créateurs ne pourront plus vivre. Pouvoir bouffer, c’est pas non plus du second degré ! C’est pourtant facile de comprendre que télécharger illégalement, c’est voler ! MK

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  4. patonze 23 février 2012 à 16 h 36 min

    Personnellement je dirais que pour écouter des « artistes » comme ces Rois de la Suède, il faudrait me payer afin de les voir en concert.
    Ca ne mérite même pas d’être volé !

    Réponse : Histoire de goût, on peut effectivement, comme vous, ne pas aimer… Ceci ne changeant rien, là non plus, à la question qui est posée. MK

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  5. CCS 23 février 2012 à 17 h 10 min

    @ Michel Kemper : « Si dès demain je vous saisie votre salaire (voler les droits d’auteurs revient strictement au même) comment réagirez-vous ? […] Regardez les choses en face, que diantre. »

    Je vous retourne l’injonction : regardez les choses en face ! Car en effet, ce qui arrive aujourd’hui pour les artistes par le téléchargement arrivera demain pour les autres. C’est que l’immatériel crée bien des bouleversements, qui se soucient bien peu des cris d’orfraie. Les gens comme André Gorz ou Yann Moulier-Boutang, qui ont réfléchi et écrit sur le capitalisme cognitif, le pressentent depuis un certain temps : l’emploi est une espèce en voie de disparition. Et comme il est vrai – sur ce point vous avez raison – qu’il faut bien bouffer, il se pourrait bien que le revenu universel soit la solution (ou alors la barbarie, qui consisterait pour ceux ayant encore du boulot à se regrouper pour défendre leur pré carré et laisser crever les autres. Une autre façon de voir les choses…).

    Réponse : Ce que vous dites est intéressant mais, sauf à un bouleversement tel que je n’ose le croire (qui me tenterait bien, pourtant), ce n’est pas la situation actuelle ou à venir. J’ai vraiment envie de dire que rien ne peut se faire gratuitement, pas pour l’instant. Je connais bien trop d’artistes (de diverses disciplines) pour ne pas savoir comment ils vivent : la plupart avec pas grand chose, pour ne pas dire presque rien. Si on leur retire encore leurs droits au seul prétexte que l’art doit être gratuit, ils crèveront de faim. MK

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  6. Philippe B. Tristan 23 février 2012 à 17 h 30 min

    Merci Michel, toujours aussi pertinentes tes chroniques !

    Un deuxième degré chez Les Rois de la Suède ?
    Oui, celui de démontrer que la liberté n’est pas un mot innocent, et qu’il demande beaucoup de précautions d’emploi.

    Par exemple les plus riches sont toujours contrariés lorsqu’il faut qu’ils paient des impôts, qu’ils perçoivent comme une entrave à leur liberté. Alors ils prennent la « liberté » de domicilier leurs sociétés dans des paradis fiscaux. Et là, soudain, ils ont l’impression de se sentir « libres » !

    Donc il s’avèrerait que le deuxième degré des Rois de la Suède soit une incitation à une réflexion philosophique : liberté est-il un synonyme d’irresponsabilité, de prédation ?

    Répondre
  7. CCS 23 février 2012 à 17 h 49 min

    @ MK : « Ce que vous dites est intéressant mais, sauf à un bouleversement tel que je n’ose le croire (qui me tenterait bien, pourtant), ce n’est pas la situation actuelle ou à venir. »

    Que ce ne soit pas la situation actuelle, c’est un fait. Que ce ne soit pas celle à venir, personne ne peut le dire. Les bouleversements surgissent rarement d’où on les attend – et parfois par « l’ordre des choses » bien plus que par l’effet d’une réelle volonté –, et il n’est pas impossible que certains soient en germe dans les évolutions liées à l’immatériel.

    Au bout du lien, une interview de Moulier-Boutang (durée 1h30) qui en parle infiniment mieux que moi : http://laviemanifeste.com/archives/351

    Pour en revenir aux « pilleurs », quand on voit les conditions imposées par les distributeurs et les diffuseurs aux artistes, quand on voit la ponction réalisée sur les produits de leur vente et ce qu’il leur reste à l’arrivée, il y a de quoi se demander qui les pille…

    Réponse : Mais si, sur « ce qui leur reste à l’arrivée », ils ont encore moins, voire beaucoup moins, parce que le disque a été pillé sans vergogne sur le net, que leur reste-t-il ? Les yeux pour pleurer ? Je dis simplement que tout travail mérite salaire et que le vol est interdit. Sur ça, on devrait pouvoir s’entendre. MK

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  8. CCS 23 février 2012 à 19 h 26 min

    @ MK : « Mais si, sur “ce qui leur reste à l’arrivée”, ils ont encore moins, voire beaucoup moins, parce que le disque a été pillé sans vergogne sur le net, que leur reste-t-il ? »

    On peut raisonner comme ça, et se dire qu’a défaut d’arrêter les plus gros des pillards, on peut au moins essayer de choper les petits ; ceux qui piquent les quelques euros qui restent au fond de la caisse…

    J’ai quand même du mal à voir les téléchargeurs illégaux comme des pilleurs, et le téléchargement comme du vol. L’idée selon laquelle « un album téléchargé = une vente perdue » est une fable. Un album téléchargé, s’il ne l’était pas, ne serait pas pour autant acheté. Simplement laissé de côté et voué à l’indifférence du pseudo détrousseur. Le téléchargement permet aussi à certaines œuvres d’être diffusées et de vivre. Je connais certains artistes qui seraient tout à fait disposés à être « pillés », sans pour autant être inconscients ou masos.

    Maintenant, il ne s’agit pas de défendre à tout pris le téléchargement illégal. Évidemment, acheter pour soutenir les artistes est important ! Il s’agit de pointer le fait que, derrière les téléchargements, se cachent des évolutions qui nécessiteront sûrement de reconsidérer les moyens de rémunération des artistes ; et peut-être, à terme, de ceux qui ne le sont pas.

    Réponse : Je suis assez d’accord avec vous au moins sur le fait que, en raison des évolutions, il faille reconsidérer, réinventer un mode de rémunération des artistes. Du reste, je ne vois pas comment faire barrage au téléchargement : on nous vend un matériel fait pour télécharger en nous disant que c’est un délit de le faire : c’est assez crétin mais notre société libérale n’est pas à un paradoxe près. Non, ce qui m’intéresse en ce débat, c’est au passage de sensibiliser le grand public au fait que la création c’est pas si immatériel que ça, qu’il y a des humains derrière, qui ont besoin de vivre, qui ont le droit de vivre de leur art. Si on arrivait à ça, on aurait déjà apporté un début de réponse. Et peut être plus de respect en direction des artistes. Merci de vos commentaires que je trouve très constructifs. MK

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  9. Nicolas Esprime 24 février 2012 à 0 h 14 min

    http://www.leparisien.fr/high-tech/megaupload-ta-liberte-de-voler-la-chanson-qui-fait-polemique-23-02-2012-1874578.php

    […]

    Le chanteur du groupe, Ivan Callot, précise que les couplets « ne s’attaquent pas aux gens qui téléchargent, mais aux chantres du téléchargement qui pensent à tort, rendre service à la culture en la rendant accessible gratuitement». Il reconnaît par ailleurs, qu’il lui arrive aussi de télécharger dans l’illégalité.

    A propos de Megaupload et de son PDG allemand, l’ancien membre des «Fatals Picards» se fait lapidaire : «je trouve incroyable que les gens soient prêts à donner de l’argent à un escroc notoire».

    Répondre
  10. Delorme 24 février 2012 à 8 h 52 min

    N’est-ce pas un problème d’inflation ?
    En période d’inflation l’argent perd sa valeur, Aujourd’hui Il y a inflation de chanteurs et de chansons, ce qui diminue leur valeur, peut-être n’en ont-ils plus vraiment aux yeux du public? Pourquoi payer pour quelque chose sans valeur?

    Répondre
  11. CCS 24 février 2012 à 12 h 37 min

    @ Pierre Delorme : l’inflation monétaire est un phénomène mécanique, basé essentiellement sur des critères quantitatifs. La valeur accordée à une démarche artistique repose elle sur des critères qualitatifs, je ne crois pas qu’on puisse comparer les deux.

    Enfin si, on peut les comparer – en définitive, il n’y a d’intérêt à comparer les choses que lorsqu’elles sont différentes ! –, mais je ne crois pas que le public considère la démarche d’un artiste comme ayant moins de valeur, sous prétexte qu’ils sont plus nombreux.

    Répondre
  12. michawicha 24 février 2012 à 14 h 29 min

    Je cite un message de Mr Poulpe (deuxième chanteur) qui revient sur les déclarations des uns et des autres sur cette chanson « Petite revue de presse rapide, notre chanson « Ta liberté de voler » est passée sur Europe1 (encore chez morandini, 3ème fois que je passe chez lui..gnii), Le Parisien.fr, et pas mal de sites d’infos . On peut dire que faire une chanson sur le téléchargement reste le tabou ultime de notre société. Pourtant le morceau est blindé de vannes, mais NON, on ne plaisante pas avec le téléchargement de Terra Nova visiblement :)
    Les deux arguments que j’adore sont « C’est du 1r degré ?? » et « Non mais c’est pas voler, c’est copier, ok ? ». Hypocrisie qui commence à fatiguer venant de la part de gens qui ont tous The.Adventures.Of.Tintin.2011.FRENCH.DVDRip.XviD chez eux. Ahem.
    Destressez vous un poil, c’est de la chanson drôle hein :)  »

    Réponse : Je maintiens : de la chanson drôle pour qui veut la voir drôle. Elle n’en pose pas moins un important débat. Que nos Rois de la Suède se retrouvent à poil à la fin de la chanson est une belle image. Si on me vole tout, je me retrouverais à poil. Si, Michawicha (c’est pratique les pseudos, dites, pour dialoguer, c’est courageux !), on vous vole vos revenus, ce à quoi vous avez droit en raison de votre travail, vous vous retrouverez à poil. C’est facile à comprendre, ça ? Faut pas être sorti de Saint-Cyr pour faire le calcul, quand même, à moins d’être amputé du bulbe… Et j’ajoute que je n’a pas The adventures of Tintin chez moi : il n’est pas encore sorti en dévédé !
    J’ajouterais de plus : s’il faut aller chercher l’explication d’une chanson ailleurs que dans les textes de la chanson elle-même (qui doivent se suffire si la chanson est bien faite), c’est à désespérer. N’êtes-vous pas capable de penser par vous-même, d’analyser, de réfléchir ? MK

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  13. Delorme 24 février 2012 à 14 h 58 min

    @CCS
    Plus ils sont nombreux (quantitatif), plus ils ont de chance de faire des choses qui se ressemblent (qualitatif), et d’être « interchangeables », en cela ils perdent chacun de leur valeur.

    Répondre
  14. CCS 24 février 2012 à 16 h 01 min

    @ Pierre Delorme : ça, des artistes interchangeables il y en a… Pour autant je ne suis pas sûr de la validité de la formule ; mais peut-être avez-vous raison…

    Par contre, ce qui semble sûr c’est que l’augmentation de « l’offre » à impulsé une répartition des ventes sur un nombre de chanteurs de plus en plus important. Le public devant se partager entre ceux-ci, chacun vend un peu moins.

    Je serais quand même curieux de savoir si les chanteurs dont il est le plus souvent question ici, qui pratiquent essentiellement la vente directe par Internet où « au cul des concerts », se sentent eux aussi victimes de la fameuse crise qui nous est vendue par l’industrie du disque ? Si oui, je serais curieux de savoir s’ils ont le sentiment que c’est dû en priorité au téléchargement illégal.

    Pour en avoir déjà discuté avec certains d’entre eux, cela n’a rien d’évident…

    Répondre
  15. Delorme 24 février 2012 à 17 h 59 min

    Oui, il faudrait leur demander, mais je crois, comme vous, que le public de ces artistes-là reste attaché au disque.

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