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Françoise Kucheida, 1946-2023

 

(photo non créditée tirée de sa page facebook)

(photo – de sa première affiche – non créditée tirée de sa page facebook)

Avant de devenir la chanteuse que l’on sait, cette native de Marles-les-Mines (Pas-de-Calais, bassin houiller du Nord) fut institutrice en maternelle, initiant ses élèves à cette chanson qu’elle tenait de son papa, qu’il pratiquait en chorales. Puis se consacra exclusivement à cette passion, allant jusqu’à créer sa propre salle, le café-théâtre Les Trois Pierrot (qui porte désormais le nom d’Allain Leprest).

En 1992, au restaurant des artistes du festival Alors chante, à Montauban, Pierre Barouh la découvre quand elle reprend une chanson à la suite d’un pianiste ayant oublié les paroles… «  Il a commencé à chanter la Bohème, mais il pédalait dans la semoule. J’étais assise pas loin, alors j’essayais de lui souffler les paroles. On a fini par me tendre un micro. » Elle n’était venu ici que pour faire son marché pour sa salle de Liévin. Et, si elle chantait – ses propres textes – ce n’était alors que pour le jeune public. « Je n’y croyais pas, j’ai tout fait pour l’en dissuader… » Mais qui peut dissuader Barouh et son blabla qu’on tiendra pour chabadabada, l’auteur-chanteur et génial patron de Saravah ?

Plus de trois ans après et sur des arrangements de Romain Didier, sort De la Scarpe à la Seine (derechef primé du Grand prix de l’Académie du disque Charles-Cros), magnifique premier album qui associe tant Prévert-Kosma qu’Aragon, Mac Orlan, Debronckart et Gainsbourg tout en créant du Romain Didier, Pierre Barouh, Allain Leprest nouveaux avec des textes écrits sur-mesure, ainsi qu’un titre d’elle, Léon, en hommage à un ami disparu. François Kucheida est née au public, qui ne sera certes jamais bien grand, à la reconnaissance d’un public chanson. Qui sait que, dans le Nord, dans les corons, vit une pépite d’une toute autre veine.

Encore sur l’insistance de Barouh, la « chanteuse adorée, préférée » qu’elle sera de Nougaro montera sur scène, dans l’Hexagone et ailleurs, jusqu’au Japon, Québec, États-Unis, en Europe de l’Est aussi. Son répertoire se bâtit sans aucun soucis de mode, s’inscrit dans la tradition. S’effaçant derrière ses chanson, Françoise Kucheida réussit paradoxalement à imposer un style.

Pour Barouh, la voix de Françoise Kucheida contient toutes les vertus du blues français, le phrasé, le timbre, le pouvoir de projeter des images, et évoque irrésistiblement la gouaille expressionniste des Damia et Fréhel. Accompagnée par des musiciens talentueux, elle rend hommage aux grands auteurs disparus (Jacques Prévert, Pierre Mac Orlan, Bernard Dimey, Boris Vian, Louis Aragon, Jean-Roger Caussimon…) mais également contemporains (Pierre Barouh, Allain Leprest, Romain Didier, Kent, Henri Crolla…) quand elle ne s’enhardit pas à chanter Kucheida, tout simplement. Alors, comme le dit son producteur Pierre Barouh, « ne regrettez pas dans dix ans, de ne pas l’avoir découverte aujourd’hui ! »

Fidèle à l’ami Pierre, Françoise Kucheida publiera trois autres albums chez Saravah : Cris du cœur en 1998, Liévin sur scène en 2002, concert chez les siens, et La Mémoire Sépia en 2006. Avant donc la création de NosEnchanteurs, ce qui fait que nous n’avions pas encore parlé de cette dame qui a pourtant toute sa place parmi ceux qui nous enchantent, nous enchanteront toujours. Pas plus que Tachan, moins même, la mort de Kucheida ne secouera les médias, englués sinon dans leur mépris au moins dans leur ignorance. Il n’empêche qu’une fois de plus, la chanson perd gros en se passant d’une de ses plus passionnantes artistes.

 

« La Bohème » : Image de prévisualisation YouTube

« Elle attend son petit » : Image de prévisualisation YouTube

3 Réponses à Françoise Kucheida, 1946-2023

  1. Gérard DEBARD 18 juillet 2023 à 16 h 45 min

    Je garderai un souvenir ému de Françoise qui nous avait invités, mon épouse et moi, pour le 10ème anniversaire des « Trois Pierrot ». Je garde en particulier la mémoire de ce sketch improvisé où, déjà bien allumés, Gilbert Laffaille et Allain Leprest se disputaient l’ »honneur » d’avoir été collaborateur (avec les nazis !)avant l’autre . Un moment inoubliable, comme la voix de Françoise. Tachan, puis Kucheida, la semaine s’annonce terrible !

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  2. Tocade 19 juillet 2023 à 8 h 10 min

    Une grande artiste dont je n’oublierai pas la voix qui s’emparait de vous et vous emportait dans la force et la beauté des mots.
    Ce décès est l’occasion de rendre hommage une nouvelle fois à Pierre Barouh, pour ses tres belles chansons bien sûr, et aussi pour tous les artistes qu’il nous a permis de découvrir

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  3. Pierre LACOMBE 19 juillet 2023 à 10 h 06 min

    Encore une grande dame de la chanson qui disparait en cet été 2023 !
    Françoise a eu la générosité de m’accueillir dans son antre de Liévin pour passer une matinée à parler chanson mais aussi des interprètes, des auteurs et des compositeurs.
    Quel bonheur de l’écouter raconter toutes les anecdotes de sa vie d’artiste !
    Depuis hier, ma tristesse s’agrandit avec tous ces départs mais je me réconforterai, je continuerai à les écouter ad vitam æternam. J’incite tout le monde à en faire autant !

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